À Bicyclette


Un jour je vis Mandy,
Trente neuf ans à peine
Étalée sur l’asphalte.
Le chauffeur, lui, indemne,
Parlait aux policiers.
Sans doute expliquait-il
Qu’elle n’avait pas freiné.1

Fit-il de la prison
Pour cet assassinat?
Non car chez nous la mort
Automobile n’est pas
Autre chose qu’un sport
Qu’encourage la loi.

Ils rôdent dans la ville
Dans leurs engins de mort
Sur la route prêts à
Me passer sur le corps.

Amri est une star,
On cherche à l’imiter.
Douze points en un soir,
Sans compter les bléssés
Un talent de champion
Cela dit c’est facile
De jouer en camion.

Se croyant dans Mario
Pare-brise pour écran
La terreur ce sont eux.
Ils tuent impunément
En se curant le nez
D’un bref coup de volant.

Ils rôdent dans la ville
Dans leurs engins de mort
Un jour mon tour viendra
De relever leur score.

Ils me frôlent et je sens
Leur chaleur sur ma peau
Jaloux et possessifs
Accidenteurs précoces
Ils passent à l’envie
Sur la route qui simule
L’extase d’un grand prix.

Il n’y a pourtant guère
Que leur pied droit qui bande
Quand grisés ils l’enfoncent
Au profond de leurs grandes
Compagnes d’acier.

Ils rôdent dans la ville
Dans leurs engins de mort,
Ces ersatz péniens
(C’est pas une métaphore).

Ces petits garçonnets
Feraient presque pitié
Assis dans leurs jouets
S’ils ne pouvaient tuer.
Feu vert, première, klaxon
Vroum acceleration!
Ils jouissent enfin.

Leur voiture c’est leur mère
Qu’ils contrôlent de la main.
Et si mon analyse
À deux balles ne vaut rien
Un homme qui conduit2
Reste avant tout quelqu’un
Qui déteste la vie.

Notes

1. Je suis arrivé quelques minutes après que Mandy se soit faite écrabouillée par un 40 tonnes, le 6 août 2014 (Bild en a parlé). L’assassin a été condamné à 6 000 euros d’amende (Welt en a parlé).

2. Tout cela vaut également pour les femmes, mais il y en a moins qui conduisent et les vers supportent fort mal l’écriture inclusive.